Les bonnes perspectives qu’affiche la campagne agricole 2022-2023 sont les fruits d’une bonne pluviométrie et surtout de meilleures dispositions prises par les autorités nigériennes pour préparer la campagne. C’est en substance ce qu’on retient de l’interview exclusive du Premier ministre Ouhoumoudou sur la situation agropastorale du pays.
Les nigériens ont encore en mémoire le déficit qui tournait autour de 40% enregistré au cours de la campagne agricole 2020-2021. Une situation face à laquelle le gouvernement n’est pas resté les bras croisés en venant en aide aux producteurs dans le cadre de la campagne 2022. Il s’est agi, dans un premier temps, de mettre en place un Plan de soutien visant, d’abord, à permettre aux producteurs d’avoir les semences appropriées. Ensuite, il s’est agi de leur permettre, en cas d’attaques d’ennemis de cultures, de sauver les productions « parce que nous avons un stock de produits phytosanitaires », a rassuré le Premier ministre, chef du Gouvernement, Ouhoumoudou Mahamadou, dans un entretien accordé à la presse nationale.
Outre ces dispositions, il s’est agi de permettre aux producteurs d’avoir l’accès aux engrais lorsqu’ils ont besoin d’améliorer leur sol. « Toutes ces mesures ont été prises par anticipation, c’est-à-dire bien avant le démarrage de la campagne », a rappelé le Premier ministre. Aujourd’hui, poursuit-il, « tout le monde est unanime pour dire que la préparation de cette campagne est l’une des meilleures que notre pays ait réalisée parce que les semences et les produits phytosanitaires ont été mis en place à temps », a déclaré le chef du Gouvernement. « Et avec la libéralisation du marché de l’engrais, le produit était disponible à temps », a-t-il ajouté.
Maitriser l’eau
Au-delà de ces dispositions, il est important d’œuvrer pour sortir de la situation de dépendance de la pluviométrie. L’agriculture nigérienne est en effet essentiellement pluviale. Le déficit de la pluviométrie est chaque fois ressenti lors des récoltes, aussi bien sur le plan alimentaire que fourrager. Une situation que le Gouvernement a pris conscience depuis plusieurs années en développant une politique agricole appelée l’Initiative 3N (les Nigériens Nourrissent les Nigériens). Son premier objectif est de permettre à ce que les Nigériens Nourrissent les Nigériens. « Mais notre objectif va même au-delà : nous voulons même nourrir les non Nigériens », a dit le Premier ministre. Pour y parvenir, poursuit-il, « il faut moderniser notre agriculture ». Selon le chef du Gouvernement, cette modernisation passe d’abord par la modernisation des techniques agricoles, notamment la maîtrise de l’eau. « Ainsi, au lieu de compter sur les pluies qui sont souvent aléatoires, nous voulons encourager les producteurs à faire une agriculture domestiquée et d’année en année, nous allons augmenter le nombre de barrages, de seuils d’épandage et celui de périmètres irrigués », a expliqué le Premier ministre. « A cela s’ajoute l’incitation à une culture mécanisée et à l’amélioration des espèces végétales », a-t-il indiqué. « C’est dans ce sens que ce que nous faisons avec les chercheurs est fondamental », a souligné le chef du Gouvernement expliquant que plusieurs recherches sur plusieurs variétés de cultures, tant pour les céréales que pour les cultures de rente, comme l’oignon, le niébé ont été réalisées. « Les chercheurs sont à pied d’œuvre pour nous trouver de variétés qui résistent à la sécheresse et des variétés plus productives », a expliqué le Premier ministre Ouhoumoudou Mahamadou. Ces actions visent en effet à faire en sorte que la sécheresse induite par le déficit de la pluviométrie ne soit plus synonyme de famine au Niger.
Pour rappel, en 2021, un déficit de 40% de la production agricole ayant touché deux millions et demi de personnes en situation de vulnérabilité extrême et plus de quatre millions en situation de vulnérabilité modéré ont été enregistré. Face à cette situation, « tout le monde se posait la question de savoir comment est-ce que nous pouvons faire », se rappelle le Premier ministre. Dès le mois de novembre 2021, « nous avons mis en place un plan d’urgence estimé à 160 milliards de FCFA qui a été suivi d’un plan de soutien dès le mois de mars estimé à 280 milliards de FCFA », a-t-il expliqué soulignant qu’à travers ce plan de soutien et ce plan d’urgence aligné au plan d’action d’aide humanitaire de nos partenaires, « nous avons pu faire face à la situation ».
Les actions menées ont consisté à la vente à prix modéré dès le mois de février de 110 000 tonnes de céréales. « Ce qui a permis de casser les prix et d’assurer l’approvisionnement des marchés. Il n’y a eu aucune pénurie, aucune rupture de stocks sur l’ensemble de la période », s’est réjoui le Premier ministre. S’ajoute aussi les distributions gratuites et ciblées dans les zones où l’approvisionnement est difficile, où les populations sont extrêmement vulnérables et où n’ont pas les moyens de pouvoir s’acheter les produits et les distributions de cash transfert entre autres.
Almoustapha Aboubacar
Niger Inter Hebdo N°83 du mardi 11 octobre 2022