Parmi les nombreuses péripéties auxquelles sont confrontées quotidiennement la jeune femme Rana, se comptent les violences physiques, morales ou psychologiques de la part de son mari. Âgée de 23 ans, femme mariée mais actuellement étudiante dans une école de santé de la capitale nigérienne, Rana raconte le calvaire qu’elle continue de vivre après trois ans de vie conjugale sans enfant.
Rana est étudiante, mariée et sans enfant. Cette jeune femme qui porte encore en elle, les afflictions qu’elle a vécues durant seulement ses trois années de mariage et de vie au foyer avec son mari. Une vie jalonnée de tiraillements entre elle et son époux, puis d’insultes et de menaces. Bref un parcours conjugal pénible de trois années qu’elle ne peut s’empêcher d’extérioriser.
Pour en parler, Rana n’a pas du tout hésité. Car dit-elle, ‹‹ il faut faire connaître à la société les jérémiades des femmes souffrant d’infertilité et dont elles-mêmes ont eu peur d’en parler ››.
C’est en effet pour elle, une façon de briser ce joug qui pèse sur la conscience de plusieurs femmes infertiles, le joug du mépris et du discrédit au sein de la sphère familiale et sociétale.
‹‹Mon mari me parle mal parce que je ne lui ai pas encore fait d’enfants ››, s’est-elle exprimée. Son mari pourtant infirmier de son état et qui travaille dans une clinique privée de Niamey, use comme à son habitude de toute son autorité d’homme sur elle avec mépris. Elle n’a le droit de broncher, sinon c’est souvent des brimades qu’elle récolte avec les insultes aux allures ‹‹ si tu es une femme, pourquoi tu n’arrives pas à me faire d’enfants ? ››.
Selon les explications de Dr Lawali Chekarao dit Moudi, gynécologue obstétricien à la maternité Issaka Gazobi de Niamey, mis à part les causes de l’infertilité qu’on retrouve à la fois chez la femme tout comme chez l’homme, ‹‹ il existe aussi l’infertilité inexpliquée qui représente 30%. Cela veut dire que la médecine n’a rien découvert qui puisse empêcher le couple d’avoir d’enfants ››.
Pourtant, depuis lors, ce n’est pas les diagnostics médicaux qui ont manqué. Au début, dit-elle, lorsque mon mari et moi étions allés nous consulter dans une clinique différente de celle où il travaille, ‹‹ après les analyses, mon mari n’a aucun problème, toutefois on a décelé pour moi les trompes bouchées ››.
Après plusieurs tentatives infructueuses pour tomber enceinte, Rana est retournée se faire consulter une fois de plus, et cette fois-ci ce n’est plus les trompes bouchées, mais c’est ‹‹ le kyste et on l’a traité par les médicaments prescrits ››.
Tout au long des démarches médicales, Rana affirme que la plupart des dépenses étaient prises en charge à son compte. Environ 500 000 FCFA déboursées avec l’aide de sa propre famille. C’est par la suite que le mari a contribué, mais dit-elle ‹‹ pas jusqu’à présent ››.
Malheureusement, Rana n’est pas encore au bout du tunnel. À la maison l’ambiance est généralement électrique. Moindre faute, le mari trouve l’occasion de découdre avec elle avec le même refrain, ‹‹ si tu es femme, pourquoi tu n’arrives pas à me faire d’enfants ? ››. Entre temps, confie-t-elle, à l’insu de mon mari ‹‹ j’ai également essayé la médecine traditionnelle, mais ça n’a rien donné ››.
En réalité, pour Rana, dans cette situation difficile, c’est l’attitude de son mari qui l’affecte sérieusement. Un mari qui a l’habitude de déverser toute sa colère sur elle, parce qu’elle n’arrive pas encore à lui faire d’enfants’’.
Dans une situation pareille, tout ce que dame Rana demande à son mari ces circonstances, c’est de lui apporter son soutien par des mots d’amour et d’encouragement.
Pour le gynécologue Dr Lawali Chekarao dit Moudi, c’est cette stigmatisation qu’il faut à tout prix combattre. Raison de plus pour que les hommes soient le meilleur réconfort à leurs épouses dans de pareils cas. Ainsi, face au contexte d’infertilité du couple, docteur Moudi conseille d’éviter de sombrer dans le stress. Toujours est-il que ce dernier aura de l’impact sur l’équilibre hormonal, facteur non négligeable pour une bonne fertilité.
En somme, loin d’exposer les déboires de son époux, Rana entend attirer l’attention de l’opinion sur le calvaire infligé à ces nombreuses femmes souffrant d’infertilité ici et ailleurs. C’est une sonnette d’alarme qu’elle tire dans l’optique de ‹‹ sensibiliser ›› sur la nécessité de briser ce tabou de la stigmatisation.
Au-delà de Rana, ce calvaire est le vécu de plusieurs femmes. Le film d’Aicha Macky ‘’l’arbre sans fruit’’ décrit avec assez de détails et de pertinence ce phénomène. Il est grand temps que les uns et les autres réalisent que l’enfant est un don de Dieu, qui le donne à qui il veut. Et se dire qu’en dernière analyse, on ne peut pas forcer le destin.
Koami Agbetiafa