L’évolution socio-politique d’un pays est faite d’évènements historiques. Certains de ces événements liés aux aspirations du peuple à la démocratie et au bien-être sont marqués par des luttes qui engendrent des chambardements.
Dans un contexte d’antagonisme entre les démocrates et les antidémocrates, le rapport de force est déterminant. L’histoire a prouvé que les démocrates finissent toujours par avoir l’adhésion populaire à leur cause, car aucun peuple ne peut se complaire dans la dictature. La négation des droits et libertés est incompatible avec la citoyenneté. C’est pourquoi, au Niger, avec les luttes du début des années 1990, avec comme point de départ la tragédie du 09 février 1990 suite à la marche pacifique de l’Union des Scolaires Nigériens, notre pays a amorcé son processus démocratique qui est passé par des étapes pour vaincre la dictature.
En effet, après l’émancipation de la plupart des syndicats et leur détermination à aller au delà du corporatisme pur et dur, la revendication des droits et libertés par les citoyens et leur participation sans crainte aux manifestations, l’avènement d’une presse débâillonnée, la création des partis politiques et autres associations, la Conférence Nationale Souveraine (CNS) a été l’étape culminante. Son importance n’est pas à démontrer, d’autant plus qu’elle est inscrite dans le préambule de notre constitution au même titre que la proclamation de la République et l’indépendance. Depuis 2011, l’Etat du Niger a instauré le 29 juillet, date de l’ouverture de la Conférence Nationale Souveraine comme « Journée Nationale de la Démocratie. »
Aujourd’hui, trente ans après (du 29 juillet 1991 au 29 juillet 2021), il est loisible de rappeler que la CNS a été une revendication légitime et populaire déterminée par la situation internationale et nationale. Sa tenue a été obtenue de haute lutte, mais n’a jamais été considérée comme étant une panacée. Toutefois, elle a fait le bilan sans complaisance de 30 ans de gestion de notre pays depuis son indépendance et a dégagé des perspectives. Elle a été un tournant décisif, un atout majeur pour notre processus démocratique. Sa préparation et son déroulement ont permis de démytifier le pouvoir et de démystifier le peuple. Elle a posé les jalons du débat démocratique dans notre pays.
Malheureusement, de nos jours, ce débat laisse beaucoup à désirer. La platitude le pollue et le rend souvent stérile. Ce qui n’est pas sans conséquence sur la formation civique, politique et idéologique gage de l’enrichissement et du perfectionnement de la gouvernance démocratique. Pour le plus grand bien de la culture démocratique, il faut réussir à élever le niveau du débat dans le sens de l’intérêt général. Pour ce faire, les discussions doivent être empreintes de bonne foi, de respect de l’autre et d’humilité.
Il ne faut surtout pas se leurrer, le développement de notre pays passe par le parachèvement de son processus démocratique. Nonobstant, ses interruptions et les différentes manœuvres de son dévoiement, il s’est frayé un chemin avec le tout récent premier passage de témoin entre deux Présidents de la République démocratiquement élus. Ils sont deux illustres acteurs de la CNS et de la préservation des valeurs démocratiques et républicaines. Ce passage démocratique de témoin est une avancée remarquable qu’il faut pérenniser.
Zakaria Abdourahaman