Se fera ou ne se fera pas ? Le divorce entre les pays membres de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) comme l’horizon s’éloigne. Et les communications des deux institutions intervenues en fin de semaine dernière, derrière le saupoudrage du langage diplomatique, laissent la porte de la réconciliation entrouverte. L’importance des enjeux, de part et d’autres, y est certainement pour quelque chose.
Les Chefs d’Etats des pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) et leurs homologues de la CEDEAO ont tenu leurs rencontres, respectivement le 14 et le 15 décembre courant. Les premiers ont publié une déclaration signée par le président de la transition du Mali, président en exercice de la confédération de l’AES.
Dans celle-ci, les Chefs d’Etats du Burkina Faso, du Mali et du Niger ont, en dépit du caractère irrévocable de leur décision de quitter la CEDEAO, érigé leurs territoires en « espace sans visa pour tout ressortissant des Etats membres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ». En outre, Les ressortissants de la CEDEAO ont le droit « d’entrer, de circuler, de résider, de s’établir et de sortir sur le territoire des Etats membres de la Confédération ».
A Abuja, les seconds, faisaient savoir qu’ils prenaient acte de la décision de leurs frères de quitter l’organisation CEDEAO, mais consentent un prolongement du délai de six mois auquel cette sortie serait effective. Dans le communiqué final de la 49ème session de la conférence des Chefs d’Etats et de Gouvernement de la CEDEAO, on apprend que les dirigeants réunis à Abuja ont renouvelé leur confiance à leurs pairs désignés pour faciliter les discussions avec les frères de la confédération de l’AES.
C’est ainsi qu’il est attendu une série de visites du président sénégalais Bassirou Diomaye Faye dans les trois capitales de l’AES afin de travailler à faire avancer le dialogue.
Un « divorce en bon ordre » ?
Il est aisé, de l’avis d’un diplomate, de voir l’expression d’une volonté partagée d’œuvrer à sauver les acquis de plusieurs décennies d’intégration de la sous-région d’Afrique de l’ouest. Cette région, la mieux intégrée du continent africain a tout intérêt à ne pas remettre en cause des avancées que lui envie d’autres parties du monde. Et les dirigeants actuels ont conscience de la responsabilité qui est la leur dans la sauvegarde des acquis au grand bonheur des populations.
Les implications de ces deux positions adoptées récemment laissent la voie ouverte à une réconciliation ou à tout le moins une cordiale entente à la suite d’un « divorce en bon ordre ».
Pour rappel, c’était le dimanche 28 janvier 2024 que le Niger, le Mali et le Burkina annonçait dans un communiqué, leur retrait de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (CEDEAO).
Une telle décision relève de la souveraineté de chaque Etat membre. Il peut quitter ce regroupement créé en 1974, en toute souveraineté comme toute autre instance. C’est du reste prévu par les traités de l’organisation. Du traité fondateur à l’acte modifié, tous ont fait une place et indiqué la procédure y afférente.
Les impacts trop importants de part et d’autres
Qu’elle soit respectée ou pas, la procédure enclenchée a des conséquences non négligeables. Sur le plan économique, le Niger a pour principal fournisseur le Nigéria qui constitue également la principale débouchée pour ses exportations. Le Mali, ce sont le Sénégal et la Côte d’Ivoire qui arrivent en tête des fournisseurs pendant que ce dernier pays constitue le principal acheteur des productions maliennes. Quant au Burkina Faso, c’est la Côte d’Ivoire qui est à la fois son principal fournisseur et acheteur.
Le Niger a ses plus fortes diasporas en Côte d’Ivoire, au Nigéria, au Ghana. Le Mali et le Burkina disposent tous deux, d’une très grande diaspora en Côte d’Ivoire. Ces échanges sociaux dénués pour la plupart de formalités administratives lourdes seront assujetties à des normes nouvelles et qui varieront d’un pays à un autre, selon les termes des accords qui seront trouvés.
Ces échanges sont facilités par la libre circulation des personnes et des biens, garantie par les instruments de la CEDEAO. Quoiqu’en disent les uns et les autres, les deux espaces sont liés au sens propres comme au figuré. Un accord global, à défaut d’une nouvelle idylle au sein de la même organisation sous régionale au sein de laquelle toutes les parties trouveront leurs comptes.
Oumou Gado