La transition malienne s’enfonce davantage et se couvre de ridicule chaque jour un peu plus. La dernière actualité fut l’organisation de manifestations de rues dans les villes du sud du pays pour dénoncer les sanctions de la communauté économique des états d’Afrique de l’ouest contre ce pays. Des foules immenses dit-on sont sorties le vendredi 14 janvier 2022. La junte à Bamako a réussi à organiser des meetings mais à quelle fin ?
Pour les populistes, il y a eu à travers ces manifestations la preuve de la ‘’popularité’’ des autorités maliennes ainsi que la manifestation du soutien du ‘’peuple’’ à leur endroit. Ce qu’ils n’ont pas manqué de brandir comme le symbole d’une harmonie sur les positions qu’ils défendent avec le peuple. Ils agiraient donc au nom du peuple qui, par cette mobilisation, vient de leur donner la légitimité que ne disposaient pas les autorités élues qu’ils ont renversées il y a presque deux ans déjà. Ironique ! Oui, ironique de voir l’étroitesse d’esprit voire la fuite en avant qui caractérise leurs discours. Une manifestation de rue aussi gigantesque soit-elle ne peut valoir un référendum ; ni une élection présidentielle basée sur un programme de gouvernance.
De là à tirer la conclusion à laquelle est très vite arrivé le colonel Assimi Goita dans une intervention sur la chaîne publique malienne, il y a un fossé que ne sauraient combler les rengaines prétendument nationalistes et panafricaines d’un Choguel au discours aussi fluctuant que les mouvements des feuilles des grands arbres de la savane qui bougent au gré de la direction du vent.
Les points de discordes
La discorde entre la bande à Goita et les institutions et pays partenaires du Mali est véritablement le retour à l’ordre constitutionnel. A Bamako on feint de l’oublier, c’est la junte militaire qui a proposé la transition de 18 mois en 2020. Chose que la CEDEAO avec accepté en accompagnant, depuis août 2020, le Mali et sa transition qui devait s’achever en février 2022. En dépit de la situation créée par le deuxième coup perpétré le 24 mai 2021, l’organisation sous régionale a poursuivi ses efforts en insistant sur l’importance de ce retour à la normale dans le délai convenu.
En transmettant un chronogramme électoral qui repousse la fin de la transition en 2026, la junte au pouvoir à Bamako s’est dédite et a affiché tout son mépris vis-à-vis du peuple devant lequel elle s’est engagée. A l’appui de cette demande farfelue on invoque la nécessité de reprendre le septentrion du pays contrôlé par divers groupes armés non étatiques. La même raison qui avait justifié une transition de 18 mois est de nouveau appelé à la rescousse pour obtenir cinq ans de plus alors qu’aucun progrès substantiel n’a été enregistré en presque 20 mois.
On n’est pas assez en sécurité pour organiser des élections dit-on depuis les salons feutrés de Bamako. On ne le sera jamais si l’armée continu à déserter le front au profit des palaces de la capitale. La bravoure et la fierté tant chantée auraient déjà servie à faire recouvrer au Mali le contrôle de son territoire au lieu de servir à mettre en place et à le faire perdurer un gouvernement de militaires et leurs amis pour emprunter les mots de Dr Choguel Kokala Maiga dans une autre posture.
On ajoute que le Mali est confronté à d’innombrables problèmes qu’il convient de résoudre avant de passer la main. Ne convient-il pas plutôt de laisser ce chantier à des autorités qui tireront leur légitimité des urnes (et non pas des armes de la République utilisées contre la République) ? Ces autorités qui agiront conformément au programme qui aura reçu l’aval du peuple seront les mieux placées pour conduire les réformes.
Les sanctions contre les partisans d’un ‘’Etat voyou’’…
Pour contraindre la transition à faire une proposition d’un chronogramme électoral raisonnable, le sommet des Chef d’Etat de la CEDEAO a adoptés des sanctions. Celles-ci basées sur le protocole additionnel sur la paix et la démocratie de l’institution, auront certainement des conséquences sur la population même si elle n’était pas la cible. Il ne s’agit nullement d’un bras de fer entre le peuple malien et la CEDEAO mais d’une mesure de coercition que Goita et ses amis peuvent faire lever en faisant preuve de bonne foi. Chose qui leur a de toute évidence manqué depuis leur arrivée à Koulouba. La posture non dialogique des maitres de Koulouba risque de faire basculer le Mali vers une dérive autoritaire sans précédent. Non content d’avoir perpétré deux coups d’Etat en un an, Goita et sa bande ont eu le culot de demander à la CEDEAO de cautionner un mandat de 5 ans. Face au refus de la CEDEAO, Goita et Choguel ont définitivement opté pour le pis-aller à savoir la facilité, le populisme paresseux. Toute la question est de savoir si les soutiens à l’échelle du Continent constituent une alternative crédible aux sanctions financières ? Pour combien de temps le gouvernement et le peuple malien peuvent-ils endurer ce qui se profile à l’horizon ?
Oumou Gado