Cinq chefs d’Etat au chevet du Mali englué dans une crise sociopolitique qui menace son existence en tant qu’Etat. Cinq chefs d’Etat des pays membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) se sont rendus ce jeudi 23 juillet à Bamako pour tenter une ultime médiation entre le président Ibrahim Boubacar Keïta et ses opposants regroupés du M5-RFP.
Sous le leadership du président Issoufou Mahamadou, président en exercice de la Cedeao, les présidents Buhari (Nigeria), Ouattara (Côte d’Ivoire), Nana Akufo (Ghana) et Macky Sall (Sénégal) ont tenté de recoller les morceaux d’un Mali qui croupit sous le poids d’une crise multiforme parce qu’elle est à la fois politique, sociale et sécuritaire avec les ¾ du territoire qui échappent au contrôle de l’Etat central.
Pour les opposants, cette crise dure depuis plusieurs années car le président Keïta est accusé d’avoir développé la corruption, les détournements des deniers publics, le copinage sur fond de revendications sociales très fortes dans un pays qui n’a pas de gouvernement. Au même moment, les terroristes font régner leurs lois. Le Mali est en train de disparaitre en tant qu’Etat. C’est pourquoi, les opposants sous la houlette de l’imam Dicko ont demandé le départ pur et simple du président Keïta, la dissolution de l’Assemblée nationale et du reliquat de la Cour constitutionnelle.
La médiation conduite par Goodluck Jonathan, ancien président du Nigeria, et le ministre nigérien des affaires étrangères du Niger au nom de la Cedeao, a conclu à un autre schéma qui maintient le président Keïta en place jusqu’à la fin de son mandat dans 3 ans, la nomination d’un gouvernement d’union nationale avec la participation de la majorité présidentielle, de l’opposition et de la société civile et la tenue d’élections législatives partielles pour pourvoir les 30 sièges litigieux. Ce schéma de sortie de crise ne satisfait pas les frondeurs.
Le départ du président malien dans les conditions voulues par les opposants pourrait être un précédent dangereux pour le processus démocratique dans un Sahel en proie à une crise sécuritaire sans précédent.
Dans la situation actuelle du Mali, il faut éviter de sombrer dans une impasse préjudiciable à l’existence même de l’Etat. Car l’un des plus gros enjeux c’est d’éviter que le Mali ne tombe totalement dans les mains des terroristes et des narcotrafiquants. Si le Mali sombre, c’est tout le Sahel voire même toute l’Afrique de l’ouest qui serait menacée. C’est pourquoi, il y a tant de mobilisation des chefs d’Etat de la sous-région.
Aussi, le schéma proposé, avec un président aux pouvoirs rétrécis, une Cour constitutionnelle renouvelée, une Assemblée nationale reconstituée et un gouvernement de large ouverture constitue une sortie de crise qui ménage les susceptibilités des protagonistes. En plus de cela, il urge d’ouvrir une enquête sur les tueries des manifestants à balles réelles par la Force spéciale antiterroriste. Comment peut-on maintenir l’ordre public en tirant des balles réelles sur des manifestants ?
Quelque soit l’issue de cette crise, le président IBK a perdu de son autorité. Il ne pourra plus diriger le Mali comme il l’a fait jusque-là. En d’autres termes, rien ne sera plus comme avant. Même l’opposition, qui n’a plus de chef de file avec l’enlèvement de Soumaila Cissé depuis 4 mois, doit apprendre à compter avec l’imam Dicko, un religieux que l’on dit proche de Iyad Aghali, un des chefs des groupes armés qui écument le nord du Mali. C’est une nouvelle équation à plusieurs inconnues pour l’opposition malienne même si l’imam prétend n’avoir pas d’ambitions politiques. Alors pourquoi a-t-il pris le leadership de la fronde anti IBK ?
Tiemogo Bizo