Au Nigeria, les élections présidentielles devraient se tenir le samedi 16 février dernier. Mais coup de théâtre, c’était à six heures du début du vote soit à deux heures du matin que la Commission nationale électorale indépendante (INEC) avait pris la grave décision de reporter d’une semaine les élections pour des raisons logistiques. Cette décision a été diversement interprétée par les deux principaux partis en compétition pour la présidentielle à savoir PDP d’Atiku Abubacar et APC de Muhammadu Buhari.
Le Nigeria a l’habitude de connaitre le report des élections mais celui du samedi dernier est inédit, renseignent des experts. En effet, si cette décision du report des élections était intervenue à 72 heures ou 48 heures, on pourrait comprendre, ont estimé beaucoup de nigérians interrogés par les médias. Juste après la décision d’INEC, les deux candidats ont exprimé leur surprise en appelant à la transparence du processus. Le candidat Atiku Abubakar et son parti ont même demandé la démission pure et simple du président d’INEC, Pr Mahmood Yakubu. Le président sortant, Muhammadu Buhari après avoir exprimé sa déception de ce qu’il a qualifié ‘’d’incompétence’’ d’INEC a déclaré au quartier général d’APC qu’il faudrait que les nigérians sachent les vraies raisons de ce report.
A travers les médias, une véritable polémique s’était installée où d’aucuns avaient même considéré que INEC avait violé la loi puisque le report n’est pas causé par des catastrophes naturelles ou autres telles que stipulées par la loi. Finalement en début de la semaine, les uns et les autres étaient obligés d’accepter de se conformer à la décision d’INEC qui est seule habilitée de conduire le processus électoral. Une véritable leçon de démocratie sous nos cieux.
INEC, une véritable emprise au-dessus des partis politiques
Le fait que le pouvoir comme l’opposition n’ont aucun contrôle sur la commission électorale a été, à l’épreuve des faits, un véritable test d’indépendance de la INEC au Nigeria. Au moment où le pouvoir appelle à la transparence, l’opposition également se cherche pour comprendre les raisons avancées par INEC. Le comble de la surprise c’est lorsque le président Buhari himself a déclaré ne pas comprendre ce report malgré le fait que son gouvernement ait mis à la disposition de cette Commission tous les moyens requis. C’est justement cela le rôle du gouvernement de ce pays à savoir pourvoir INEC des moyens nécessaires pour la tenue des différents scrutins. Pour le reste et tout le reste, INEC est au contrôle. C’est pourquoi, quand il s’est agi de prendre cette grave décision INEC n’a avisé ni pouvoir ni opposition parce que de par la loi c’est sa vocation, sa prérogative. Cela est un gage d’un processus électoral crédible et transparent pour un pays aussi instable qu’est le Nigeria.
D’autres acquis du processus électoral nigérian
Il est incontestable que le processus électoral nigérian se construit progressivement. La commission électorale INEC a un département éducation et sensibilisation des citoyens. Et les médias écrits comme audiovisuels contribuent à éduquer et sensibiliser les populations sur les bonnes pratiques avant, pendant et après les élections. Dans le souci d’apaisement, les deux candidats avaient signé le pacte de bonne conduite quel que soit le résultat si le processus électoral est mené à terme par INEC conformément à la loi électorale.
A travers le pays, la campagne électorale a été vive et inclusive. Les affiches et posters des candidats partout attestent justement l’inclusivité et la vivacité de cette campagne. Les médias nigérians également accompagnent positivement le processus électoral qui en sensibilisant, qui en animant des débats avec des experts dans différents domaines relatifs au processus électoral. Comment ne pas être sensible à l’émission ‘’The verdict’’ sur Channels, une chaine TV privée où tous les jours les citoyens vivent intensément le débat démocratique ? Il y a de ce point de vue un effort à faire par les médias au Niger pour les débats sur les vrais problèmes du pays. Il n’y a pas de démocratie sans véritables débats contradictoires sur les préoccupations du peuple. Nul doute que pour l’éclosion d’une opinion publique forte, l’information, la saine information est incontournable. La participation à la vie publique et le contrôle de l’action gouvernementale l’exigent. Et la presse a le devoir d’informer objectivement. En un mot comme en mille, on peut dire sans risque de se tromper que le processus électoral nigérian a des acquis incontestables. Une très bonne perspective pour ce pays très instable.
Elh. M. Souleymane