57ème Sommet de la CEDEAO : A quand une résolution contre la tentation d’un 3ème mandat ?

Ce lundi 7 septembre 2020, le Président Issoufou Mahamadou, Président en exercice de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a présidé la cérémonie officielle d’ouverture de la 57ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de cette organisation régionale. Après le défi sécuritaire et l’intégration  économique, une question qui taraude l’esprit de plus d’un citoyen de l’espace CEDEAO est de savoir à quand une résolution pour mettre définitivement un terme au tripatouillage des constitutions par les chefs d’Etat pour s’octroyer un 3ème mandat ?

A l’ouverture de la 5ème législature du Parlement de la CEDEAO,  en tant que Président en exercice de la CEDEAO, le 9 mars 2020, le Président Issoufou a déclaré : «… le temps des hommes qui s’autoproclament providentiels et donc irremplaçables, des hommes qui cherchent à s’incruster à vie au pouvoir, tire à sa fin. Cela se traduira par des alternances plus fréquentes et par une respiration démocratique qui consolident les institutions démocratiques dont nos peuples ont tant besoin. Cela nous permettra de faire l’économie des crises comme celles que nous connaissons actuellement en Guinée Conakry et en Guinée Bissau ». C’était justement pour saluer le courage d’Alassane Ouattara lorsqu’il a renoncé à sa candidature à un 3ème mandat en mars 2020.

A la même occasion, jetant des fleurs à Ouattara, Issoufou Mahamadou a martelé : « Je me réjouis de ce que les valeurs démocratiques y progressent. En témoigne la généralisation de la limitation des mandats à deux et de leur durée à cinq ans, dans les constitutions de la quasi-totalité de nos États membres. En témoigne également la décision récente prise par mon frère et ami Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire, de ne pas briguer un 3eme mandat malgré la possibilité offerte par la constitution de son pays. Permettez-moi de saluer son courage et de l’en féliciter. Il s’agit là d’un évènement majeur qui intervient dans un des pays les plus importants de notre communauté. »

Cette posture du Président Issoufou est d’autant compréhensible qu’au Niger, en 2018, deux acteurs de la société civile de l’Association UJND (Union des jeunes nigériens pour le développement) ont été interpellés à Zinder la police judiciaire pour avoir appelé le président Issoufou à briguer un 3ème mandat.

Mais comme qui dirait, ironie du sort, le mandat du Président Issoufou à la tête de la CEDEAO a été entaché, entre autres, par cette posture des présidents Alassane Dramane Ouattara et Alpha Condé qui s’engagent résolument pour rempiler par le biais d’un 3ème mandat.

L’on se souvient qu’à visioconférence sur le Mali, le 20 août dernier, ce débat a été posé par le Président de la Guinée-Bissau. Dans son allocution d’ouverture du 57ème Sommet de la CEDEAO de ce lundi 7 septembre 2020, en parlant de la gouvernance démocratique Issoufou Mahamadou  a dit : « Les crises multiformes qui secouent notre espace commun nécessitent d’y consolider les institutions démocratiques. Celles-ci doivent être capables d’y faire face. Elles doivent être capables de garantir la paix, la sécurité, la stabilité et le progrès économique et social conformément aux promesses de nos différentes constitutions et aux dispositions du protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance. Les démocraties, pour réussir, ont besoin d’institutions  fortes. Leur échec est souvent dû à la faiblesse des Etats. Dans ce domaine il y a, à la fois des avancées et des reculs mais globalement notre région a accompli des progrès remarquables. »

Les chefs d’Etats vont-ils justement considérer la tentation du 3ème mandat comme un recul démocratique et une imposture aux antipodes de la bonne gouvernance ? A quand une résolution contre un 3ème mandat dans l’espace CEDEAO ?

Le Président du Nigeria, Mahammadu Buhari a bien voulu apporter de l’eau au moulin du président Issoufou lorsqu’il a martelé : « Il est important qu’en tant que dirigeants de nos États membres de la CEDEAO, nous devions adhérer aux dispositions constitutionnelles de nos pays, en particulier sur la limitation des mandats ». C’est dire qu’il est permis d’espérer !

Elh. M. Souleymane